En Éthiopie, la région Afar fait face à une flambée alarmante de la malnutrition aiguë sévère. Entre janvier et février 2025, les admissions ont bondi de 44,3 % par rapport à l’an dernier. En cause : une conjugaison de sécheresse, de restrictions humanitaires et d’indifférence politique.
Parmi les vastes étendues arides de l’Afar, au nord-est de l’Éthiopie, les chiffres se passent de commentaires : 1 768 nouveaux cas de malnutrition aiguë sévère enregistrés en deux mois seulement. C’est Première Urgence Internationale, présente dans la région depuis plusieurs années, qui tire la sonnette d’alarme. Le bond de 44,3 % par rapport à la même période en 2024 illustre un glissement rapide vers une crise nutritionnelle majeure.
Une explosion qui est surtout due à un désengagement international préoccupant. Depuis plusieurs mois, les financements humanitaires se tarissent, conséquence d’un recentrage des priorités globales et de tensions persistantes entre le gouvernement fédéral et certaines agences de coopération. Résultat : les centres de santé sont débordés, sous-équipés, et les denrées alimentaires de secours manquent cruellement.
À cette asphyxie budgétaire s’ajoutent les effets dévastateurs de l’inflation, qui rend inaccessibles les produits alimentaires de base pour les familles pastorales déjà fragilisées par des années de sécheresse. Dans une région où l’économie repose en grande partie sur l’élevage nomade, la perte du cheptel sonne souvent comme une condamnation.
Mais plus inquiétant encore, c’est l’accès à l’aide humanitaire elle-même qui est entravé. Routes impraticables, lenteurs bureaucratiques, restrictions imposées aux ONG sur le terrain : autant de barrières qui compliquent chaque livraison, chaque prise en charge. Et ce, dans une région historiquement marginalisée, où le sentiment d’abandon par le pouvoir central est profondément enraciné.
Silence diplomatique, indifférence politique
Pendant que la situation empire, les grandes capitales gardent le silence, trop absorbées par d’autres foyers de tension dans la Corne de l’Afrique. Quant au gouvernement éthiopien, il communique peu sur les chiffres de la malnutrition, préférant mettre en avant ses efforts de reconstruction post-conflit au Tigré ou ses ambitions économiques nationales.
Sur le terrain, les ONG font ce qu’elles peuvent, mais les besoins explosent plus vite que les capacités de réponse. Sans un sursaut rapide de la communauté internationale — tant en termes de financement que d’accès sécurisé pour les humanitaires —, la crise nutritionnelle dans l’Afar pourrait devenir l’un des drames silencieux de l’année 2025.
Et comme souvent, les premières victimes sont les enfants.