Cette année marque un événement significatif pour le peuple Afar : l’Alphabet Afar fête ses 50 ans. Un demi-siècle après son adoption officielle, cet alphabet a joué un rôle clé dans la préservation et la promotion de la langue et de la culture Afar et renforcer l’identité culturelle de ce peuple Afar.
Une Histoire de revendication et de renouveau linguistique
Langue d’expression orale vieille comme le monde et forte de près de 5 millions de locuteurs dans cette région d’Afrique de l’Est, c’est au début des années 1970 que le projet de transcription de cette langue fût émergé. Deux jeunes intellectuels afars, Ahmed Abdallah Dimis et Gamal Abdoulkader Redo, qui suivaient alors un entraînement militaire en Somalie, parmi soixante autres camarades venus de toutes les régions afares, acteront ce projet de transcription en écriture latine.
Le choix du système graphique a été un moment crucial dans cette démarche. Après des débats et des expérimentations, le système d’écriture qui a été adopté s’inspirait largement de l’alphabet latin, en tenant compte des spécificités phonétiques de la langue Afar. Ce système, simple et accessible, a rapidement trouvé son public.
Une Œuvre à caractère collective
L’initiative n’a pas seulement été portée par des linguistes, mais aussi par des leaders culturels et communautaires. Il s’agissait d’un projet collectif pour donner une nouvelle voix à la langue et l’adapter aux réalités modernes. L’Alphabet Afar est devenu un outil fondamental pour la publication de livres, journaux, et autres documents officiels dans cette langue. C’est ainsi que le peuple Afar a pu affirmer son identité à travers la langue écrite, un vecteur essentiel de transmission culturelle et de développement.
L’introduction de l’écriture a eu des retombées immédiates sur l’éducation surtout en région Afar d’Ethiopie où elle est rapidement devenu une langue administrative à part entière et fait parti désormais des 7 langues officielles de l’Ethiopie. A Djibouti aussi elle s’est tout doucement imposée via l’entité Afar pen qui a su vulgariser au grand public la langue afar comme outil de communication. Son intégration tout récemment dans les plateformes de traduction linguistique n’a fait qu’accélérer cette diffusion à grande échelle.
Un avenir prometteur pour la Langue Afar
Bien que de nombreux progrès aient été réalisés au cours des 50 dernières années, des défis demeurent. Des efforts sont toujours en cours pour encourager une plus grande utilisation de l’écriture dans les médias, le secteur public et l’éducation.
Le rôle de l’Alphabet Afar dans la lutte pour les droits linguistiques et culturels continue de croître. Il est aujourd’hui perçu non seulement comme un outil de communication, mais aussi comme un symbole de résistance et de résilience face aux défis contemporains.
Le cinquantième anniversaire de l’Alphabet Afar est une occasion de célébrer non seulement une réalisation linguistique, mais aussi l’histoire et la culture d’un peuple. En ce moment de rétrospection, on peut voir avec fierté les progrès accomplis, tout en regardant vers l’avenir avec optimisme. L’Alphabet Afar reste un instrument indispensable pour préserver et diffuser la langue, l’histoire et les valeurs de ce peuple résilient.
L’alphabet afar se compose de 5 voyelles (yangayyi : qui bouge) et de 17 consonnes (mayangayyi : qui ne bouge pas). Il utilise des lettres de l’alphabet latin auxquelles 3 lettres ont été rajoutées pour décrire les 3 sons caractéristiques suivants:
Le “q” est l’équivalent du « eain » en arabe. C’est une consonne pharyngale fricative sonore
Le “x” est un d non pas dental comme en Français, mais qui se prononce la langue retournée sur le palais et qui vient claquer sur les dents. Lorsque cette consonne est située au milieu d’un mot, le son produit doit ressembler à un mélange du d et du r roulé. C’est une consonne dentale rétroflexe occlusive.
Le “c” est un h guttural très prononcé. C’est une consonne pharyngale fricative sourde.