Le port de Tadjourah en déchéance programmée

Situé sur la côte nord-est de Djibouti, le port de Tadjourah joue un rôle crucial dans la dynamique économique de la région. Disposant d’une position stratégique à proximité des voies maritimes importantes, le port est un point d’entrée vital pour le commerce maritime dans la région. Il sert non seulement Djibouti, mais aussi des pays voisins comme l’Éthiopie, qui dépendent fortement des infrastructures portuaires pour leurs importations et exportations. Inauguré en Juin 2017, le port peine cependant à trouver sa vitesse de croisière.

Une naissance sous contrainte

Le port de Tadjourah a été développé en réponse à des besoins logistiques croissants, notamment en raison des pressions du gouvernement éthiopien soucieux de diversifier son approvisionnement qui avait jeté son dévolu sur Tadjourah. Ville historique jadis connu pour ses activités commerciales avec l’Abyssinie, un port à Tadjourah devait permettre à l’Éthiopie, un pays sans accès direct à la mer, de renforcer ses échanges commerciaux et de diversifier ses voies d’approvisionnement. Et surtout d’alimenter en continu le Nord de l’Ethiopie notamment Mekelé la capitale du Tigré, fief du précédent gouvernement centrale éthiopien, le TPLF. Djibouti s’étant au début distingué par sa discrétion avait, après moult relances éthiopiennes, accepté à contre cœur l’établissement d’un port à Tadjourah. Et ce n’est pas faute d’avoir émises d’autres propositions.

Un port prometteur mais pas que…

Financé par un fonds kowetien le port, reparti sur 30 hectares, dispose d’un terminal destiné au traitement de la potasse – produit d’exportation clé de l’Ethiopie – d’une capacité de 200 tonnes par heure, de deux postes à quai de 435 mètres de longueur et un terminal roulier de 190 mètres. Tadjourah devait être capable à terme de traiter 35% des marchandises en transit vers l’Ethiopie selon le président de la DPFZA Aboubaker Omar Hadi. Sept ans après on est bien loin du chiffre escompté par ce dernier.

Le port de Tadjourah, malgré des performances inédites constatés sur le plan national, ne bénéficie que 2 types de navires vraquiers – le charbon et la ferraille- pour une fréquence moyenne d’un navire par mois. L’affrètement des navires vers le port de Tadjourah est strictement encadré par le président des autorités portuaires, Aboubaker Omar Haid. Ainsi lorsque qu’une délégation éthiopienne d’hommes d’affaires, au terme d’une réunion de travail commença à manifester un intérêt solennel pour le port de Tadjourah, c’est d’un ton presque menaçant qu’il intima à son équipe d’orienter cette délégation vers le Port de Damejog, et en aucun cas vers celui de Tadjourah. Une hostilité assumée vers ces régions du Nord et partagée au plus haut sommet de l’Etat.

Malgré le manque de soutien gouvernemental, le port a réussi à maintenir un certain niveau d’activité. Les volumes de cargaison traités ont montré une résilience notable, en partie grâce à des initiatives privées et une population dévouée consciente des potentialités du port et les retombées économiques qui en découlent.

Une mine de charbon à ciel ouvert

Le manque d’investissements dans les infrastructures nécessaires pour moderniser le port et améliorer son efficacité complique davantage l’avenir autrefois prometteur du port de Tadjourah. L’activité principale du port repose sur le déchargement et transbordement du charbon qui est déchargé sans équipements de sécurité et empiler à l’air libre dans l’attente d’être acheminé par voie routière. Des opérations de manutentions qui inquiètent la population tadjourienne et qui soulève de sérieuses préoccupations environnementales et sanitaires.

Le port de Tadjourah représente une opportunité économique sous-exploitée pour Djibouti, ses performances actuelles et son potentiel de croissance suggèrent qu’avec les bonnes initiatives, il pourrait devenir un acteur clé du commerce maritime en Afrique de l’Est.

Vue aérienne du Port de Tadjourah

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